Comment l’Australie n’est pas devenue française

Cécile Mazurier - 11.07.13 - www.MyFrenchLife.org - 1

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Après avoir harcelé Napoléon pendant des mois, Nicolas Baudin obtient enfin l’accord de ce dernier pour lancer une expédition de découverte en Nouvelle-Hollande. Le troisième et dernier chapitre des expéditions en Terre Australe enclencha la vitesse supérieure.

En cette fin de siècle, l’influence de Napoléon croissait à vue d’œil. Quant à la Nouvelle-Hollande, elle était la dernière obsession de Nicolas Baudin après le succès de son expédition scientifique précédente aux Antilles.

Le principal objectif de cet énième voyage aux antipodes était de déterminer si les bouts déjà cartographiés de l’île n’en constituaient qu’une seule.

En 1800 Napoléon se voyait déjà maître du monde et la Nouvelle-Hollande était l’un des endroits les plus captivants du moment.

France ou Angleterre ? Baudin et Flinders, rivaux dans la course aux antipodes

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Lorsque les Anglais, qui ne rataient jamais une occasion de défier les Français, eurent vent de l’expédition, ils lancèrent la leur, avec Matthew Flinders pour commandant. Après un départ en octobre en 1800 les Français atteignirent la Nouvelle-Hollande en mai 1801 tandis que Flinders arriva en décembre.

Pendant deux ans, les bateaux de Baudin, Le Géographe et Le Naturaliste, explorèrent les côtes sud et ouest de l’Australie et la Tasmanie. En 1803 les deux commandants mirent les voiles pour l’Europe. Ils avaient, malgré leur franche rivalité, fait preuve de galanterie en s’octroyant des laisser-passer et baptisant affectueusement l’endroit de leur rencontre en mai 1802, Encounter Bay.

Dans l’hémisphère nord, l’Angleterre était à nouveau en guerre contre la France et Flinders, ignorant tout du contexte, fut retenu prisonnier à l’Ile de France pendant sept ans. En 1807, il apprit à sa surprise que Baudin avait attribué des noms français aux zones qu’il avait aussi découvertes.

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L’expédition française pour l’amour de la science

Napoléon avait ordonné à Nicolas Baudin de constituer une collection d’espèces naturelles et animales, de cartographier la côte sud de la Nouvelle-Hollande, et, d’éventuellement, la réclamer pour la France.

Napoléon avait organisé une opération gigantesque. Baudin, pourtant à l’origine de cette entreprise, se vit dépassé par les ambitions du gouvernement, qui en demandait trop. L’ambiance à bord se détériora rapidement et l’expédition ne se déroula pas comme prévu.

Baudin possédait certes peu d’ambition politique, mais son expédition devint l’un des plus grands voyages scientifiques de son temps. Le Géographe et Le Naturaliste délivrèrent des milliers de spécimens animaux, végétaux et minéraux.

La conservation et le maintien en vie de ces milliers de plantes et d’animaux pendant l’année du voyage de retour à travers différents climats fût l’un des plus grands accomplissements. Si Baudin, tuberculeux, n’a pas fini le voyage en vie, les kangourous, si.

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Que retient-on des tentatives françaises de contrer les Anglais ?

En 1811, Louis de Freycinet délivra la première carte complète de l’Australie. Napoléon mourut avant la seconde édition de 1824 et la majorité des noms français avaient été remplacés par des noms anglais.

Ni Baudin, de Saint-Aloüarn ou La Pérouse ne réussirent à mettre la main sur la Terre Australe et anéantir les plans coloniaux des Anglais. De nos jours sont disséminés çà et là quelques nomsfrançais, Vaucluse à Sydney, la péninsule Fleurieu, le parc national Freycinet ou une plaque commémorative pour de Saint-Aloüarn en Australie-Occidentale. Le nom de Nicolas Baudin ne figure nulle part.

La France, prise dans une course avec son éternel rival aux ambitions démesurées, est toujours arrivée en retard mais fait figure de bon perdant.

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Bill Bryson s’imaginait que, si La Pérouse était arrivé avant la Première Flotte et réclamé l’Australie pour la France, elle « aurait échappé à deux cents ans de cuisine anglaise »¹.

Et vous, comment imaginez-vous une Australie « française » ?

Référence :
1. Bill Bryson, ‘In a Sunburned Country‘, Broadway Books, 2001, p.49
Crédits images :
1. Port Jackson,vu par Charles-Alexandre Lesueur, illustrateur officiel, via L’histoire par l’image
2. Portrait de Nicolas Baudin, héros oublié, via fine art america
3. Le Géographe et Le Naturaliste, via Wikipedia.fr
4. Les kangourous gris de l’île Decrès, par C.-A. Lesueur, via L’histoire par l’image
5. Sur la route de La Pérouse, Sydney, par Cécile Mazurier
By Published On: Sep 11, 2013Comments Off on Comment l’Australie n’est pas devenue française

About the Contributor

Cécile Mazurier

Three things about France I miss and how writing is (among other things) a way to sublimate the loss: 1. red wine 2. cornichons 3. sarcasm. I live in Sydney and I like demystifying clichés. You can contact me on LinkedIn or follow my non-adventures in my blog.

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