La Parisienne Pâtés in Melbourne, plus français que français
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Imaginez un peu. Un(e) superbe Français(e) avec son plus bel accent murmurant à votre oreille : saucisson, pâté, charcuterie, éclair au chocolat… La tentation à Melbourne a un nom : La Parisienne Pâtés, au 290 Lygon St.
Un jour je suis allée me promener à Carlton. Au milieu du quartier italien, j’étais assurée, pensais-je, de ne pas tomber sur quoi que ce soit de français. Vous savez, cette légendaire compétition entre la France et l’Italie, de qui d’entre eux a les femmes les plus sexy, la meilleure gastronomie, le pire taux de chômage, etc. (demandez-moi, je connais les réponses). Je pensais être en sécurité. Après un an et demi en Australie, j’avais oublié l’entêtement français s’incarnant ici dans cette petite boutique à la sculpture de cochon et bouteilles de sirop Monin en vitrine. Brian Eno l’a dit, « on ne peut en fait pas s’échapper » et je n’allais pas résister à l’appel de la baguette et du saucisson.
La terrine maison vous sauvera la vie
Dans le long et lumineux magasin j’ai eu tout le loisir de contempler les étals et les étagères, débordant de nourriture. Avec peut-être quatre à cinq mètres de chaque côté de tartes maisons, de condiments, de légumes en conserve, de fromages, pâtés et terrines, charcuterie, gâteaux, je n’ai pas eu de problèmes à comparer La Parisienne Pâtés à une pharmacie.
La gorge irritée ? Prenez un Paris-Brest. Anxieux ? Choisissez un pot de moutarde de Dijon, du sel de mer et une conserve de ratatouille Cassegrain pour accompagner votre magret. Agoraphobe? Prenez place au restaurant et commandez une soupe à l’oignon ou la spécialité de la semaine. Et si vous êtes un expatrié souffrant du mal du pays, un pot de confiture Bonne Maman, une baguette et du beurre salé vous remettront d’aplomb.
Je n’avais ni faim ni besoin d’un remède mais on n’a pas besoin d’avoir faim pour manger alors j’ai cherché quelque chose de simple. Terrines porc et pistache, agneau et romarin, cornichons, fromage de brebis Ossau Iraty, du pain évidemment, un éclair au chocolat et un Orangina. Simple, j’ai dit.
Tradition et qualité en territoire français
Sirotant mon soda, je n’avais pas encore réalisé qu’une chanson de Notre-Dame de Paris, cette atroce comédie musicale que je croyais engloutie dans les ténèbres depuis 2003, sortait des enceintes du magasin me ramenant à mes années collèges. Je promenai mes yeux aux alentours encore une fois, sur l’étal de fromages, les étagères remplies de bouteilles de sirop Monin. Je n’en avais jamais vus autant.
“C’est la France d’Amélie Poulain”, j’ai pensé. La France du label « à l’ancienne », la France des Parisiens et de la limonade maison que plus personne ne boit. Les conserves de haricots et de flageolets vendus comme des produits de luxe. Les produits, exception faite des gâteaux, macarons et fromages faits maison, fabriqués depuis quinze ans dans leur usine. Une France conservatrice vue par le prisme du vintage et du romantisme qui vivrait en autarcie. Je n’aimerais pas un tel pays mais depuis la perspective melbournienne cela semblait pertinent. De l’autre côté de la planète, l’Europe, autant que l’Australie là-bas, est source de fantasme et d’exotisme.
Alors que je quittais la boutique, satisfaite, la baguette sous le bras, ma journée devint différente.
Et ce n’est que lorsque m’attablant, je rompis le pain, coupai une tranche de terrine et l’avalai, salivant, avec un cornichon dégoulinant de vinaigre que je réalisai que ce fantasme en valait sacrément la peine !